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  • Crédit: Damon Shaff

Surf de rivière : Hawaï à Montréal

Les bikinis vont-ils fleurir sur les plus belles vagues du Québec ? Entrevue avec Corran Addison, importateur et promoteur du surf de rivière à Montréal.

Nous vous en parlions dans notre dernier numéro : la vague du surf de rivière ou  River Surfing  a déferlé sur la province. Réservé autrefois aux grands blonds et bronzés des côtes américaines, le surf s’adapte aujourd’hui aux vagues éternelles de la rivière. Le Saint-Laurent offre à ces nouveaux surfeurs eau « chaude » et débit assuré tout l’été. Bref, toutes les conditions pour faire de Montréal la nouvelle capitale mondiale de la discipline.

Comment est né le River Surfing ?

Ce n’est pas nouveau. Il y a 10 ans, j’entendais déjà parler de surfeurs de rivière, mais c’était un par ici, un par là, rien de bien sérieux. Personne ne développait d’équipement spécifique pour cela et nul n’en faisait la promotion. Je ne suis pas le seul aujourd’hui à me consacrer  au surf de rivière, mais la notoriété et l’influence que j’ai dans le monde de l’eau vive m’ont permis d’aller plus loin et plus vite que quiconque auparavant. (NDLR : Sud-Africain d’origine, basé à Montréal depuis près de 10 ans, Corran Addison est l’un des grands gourous du kayak d’eau vive mondial.)

Comment cette nouvelle passion a-t-elle démarré ?

C’est la liberté ! En kayak, on se sent comme un gladiateur partant en guerre. Une armure quasi intégrale, une jupette en néoprène de 4 mm, un gilet de sauvetage et un paddle jacket… Beaucoup trop de matos tout ça ! En surf, tu te sens libre. Juste la planche et toi. C’est une des raisons pour lesquelles j’aime le surf. J’aime aussi la sensation procurée par la position debout sur la planche, et la possibilité de se servir de tout son corps pour la piloter. Ça c’est une belle nouveauté.

Fini le kayak ?

Jamais de la vie ! Le kayak est mon premier amour et je l’aimerai toujours. Disons que le surf est ma maîtresse… Ce qui est plutôt cool, c’est que le kayak (ma femme) s’en fout. J’aime le kayak, mais je veux faire les deux, surf et kayak.

RIVER SURFING : MODE D’EMPLOI

Le matériel

La planche : elle est spécifique à la pratique du surf en rivière. Elle est plus épaisse, plus large et plus gironnée. La marque italienne Drago Rossi s’apprête à commercialiser un modèle de série en plastique « HDTP » (plastique haute densité beaucoup plus rigide que les plastiques traditionnels). Cette planche a été conçue par Corran Addison (pour louer ou acheter, le contacter). À l’achat, compter 700 $ pour la planche tout équipée. Également sur commande : short et long boards en Carbone (1000 $ et 1200 $). Plus d’infos sur le site de Drago Rossi : www.dragorossi.com et sur celui de Corran Addison : 2imagine.net

Le casque : il est indispensable car sous les vagues, les rochers ne sont jamais loin. Un casque de kayak standard fait parfaitement l’affaire. Les surfeurs affectionnent les casques de la marque Gath (gathsports.com), certainement pour leur look et leur conception, mais pas pour leur prix…

La veste de flottaison : pour commencer, un VFI de kayak peut dépanner, mais si vous devenez un adepte, vous chercherez vite un modèle moins encombrant. La marque NRS (nrsweb.com) a conçu un modèle très fin, qui s'intègre dans un top en lycra (Anti gravity). Le tout s’enfile comme un t-shirt et ne gêne pas la mobilité du surfeur.

La combinaison en néoprène : là encore, les surfeurs préfèrent les modèles fins qui ne gênent pas le mouvement ...pas trop fin quand même car la combinaison protège aussi des coups.

La « Wax » : il s’agit d’une cire que l’on applique sur la planche (à la place des pieds) et qui permet aux pieds de bien adhérer, sans trop coller non plus. Se trouve notamment en boutique de planche à voile.

Où regarder les surfeurs de rivière ?

Pour l’instant, c’est à Montréal que vous aurez le plus de chances d’en apercevoir; particulièrement sur le site d’Habitat 67, situé à proximité du Vieux-Port, juste en amont du pont de la Concorde, qui mène au Casino de Montréal. C’est notamment à cet endroit que Corran Addison organise ses stages d’initiation. Attention, ne vous lancez pas sur ces vagues sans assistance et sans initiation. On ne plaisante jamais avec le St-Laurent…

Les garçons doivent-ils obligatoirement avoir les cheveux longs et les filles porter un G-String pour être bons en River Surf ?

Non, mais ça aide ! Sérieusement, je crois que l’on verra plus de jolies jeunes femmes en surf qu’en kayak pour la raison que j'évoquais plus tôt. Quand on fait du kayak, on dirait que l’on part en guerre, et les filles n’aiment pas vraiment ça. Le surf, c’est cool, c’est tendance et on peut porter le bikini. Rien qu’avec cet argument, nous verrons 10 fois plus de filles surfer que nous en verrons pagayer.

Les sensations du surf de rivière diffèrent-elles de celles du surf traditionnel ?

Bien sûr il y a des ressemblances, mais c’est assez spécifique. L’accès à la vague, au départ, est très particulier. Sur l’océan, la vague vient vers toi et tu avances sur l’eau. En surf de rivière, tu restes à la même place et c’est la rivière qui défile sous tes pieds. La vague n’est pas aussi dynamique que sur l’océan, mais elle est sans fin, elle dure toujours et ça, c’est plutôt génial.

Le matériel est-il spécifique à la rivière ?

Oui. On peut toujours utiliser une planche traditionnelle, mais elle casse vite. Les rivières ne sont pas salées, par conséquent la planche flotte moins. Il faut nager dans des courants violents et attraper les vagues à la volée. Les planches sont donc généralement plus larges, plus épaisses et elles sont plus gironnées. Elles sont aussi plus solides : il y a des rochers dans les rapides. À une époque, je cassais une planche tous les trois mois. À 900 $ la planche, cela devient vite cher. Les planches en plastique ou en carbone sont donc idéales.

Quels sont les grands sites de pratique dans le monde ?

La « Mecque », c’est le Eisbach, ainsi que le Witlesbach, deux rivières situées dans les English Gardens de Munich en Allemagne. Après vient certainement Montréal. Les vagues y sont bien plus grosses qu’à Munich. Ailleurs, des sites de pratique naissent un peu partout : sur la Skookumchock en Colombie-Britannique, « Pipeline » sur le Lochsa en Idaho, « Lunch Counter » sur la Snake au Wyoming, et aussi le « rapide 11 » sur le Zambèze en Zambie. C'est un nouveau sport, mais son développement est rapide.

Où peut-on pratiquer au Québec ?

Au printemps, certainement sur la Jacques-Cartier (Pont-Rouge / Donnacona), la Gatineau et bien sûr à « Habitat 67 » sur le St-Laurent. Il y a probablement d’autres endroits, mais ils sont à découvrir.

Tout le monde peut-il en faire ?

Bien sûr, mais c’est comme tout sport « extrême » : si vous vous jetez directement dans les rapides de Lachine, vous vous tuerez. Il faut d’abord apprendre à lire la rivière, mais aussi à contrôler sa planche. Si vous commencez par ça et que vous prenez le temps d’apprendre, c’est très facile et sécuritaire. C’est ce qui m’a poussé à organiser des stages de surf de rivière cette année. Je veux développer la pratique, mais je ne veux pas pour autant que les gens se tuent!

Penses-tu que le river surf peut devenir populaire au Québec ?

Oui. Il y a déjà plus de surfeurs que de kayakistes à Habitat 67. Le Québec est chaud l'été, et on a beaucoup d'eau : deux conditions essentielles !

Les kayakistes de Montréal acceptent-ils bien la présence nouvelle des surfeurs de rivière ?

Pour l'instant oui. Il reste à voir si les "surfeurs de mer" vont arriver avec leur attitude parfois déplorable. On y trouve très souvent des snobs, et parfois des imbéciles. La "gangster sportsman" attitude ! On espère qu’à Montréal et sur les rivières en général, les surfeurs vont adopter l’attitude des kayakistes qui est plutôt gentille, fun et cool. Si les choses se passent ainsi, il y aura une relation symbiotique qui marchera bien. D'ailleurs, beaucoup de kayakistes à Montréal se sont déjà mis à surfer…

 
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