Fatbike : Au cœur de l’hiver en bikepacking

La foudroyante popularité du fatbike déborde désormais des centres de plein air, et nombreux sont ceux qui en ont fait leur allié d’expédition et de camping en la froide saison. La monture aux étonnantes capacités de chargement s’avère idéale pour l’exploration sous zéro et les possibilités, au Québec comme ailleurs, s’en vont croissant.

C’est par nécessité que le bikepacking hivernal s’est imposé à Jordan Rémilleux. Mordu de vélo et de camping, ce pilote d’avion basé au Nunavik s’est vu obligé de troquer sa monture de montagne pour le fatbike, conditions du terrain obligent. Car les environs de Kuujjuaq nécessitaient, disons, un moyen de locomotion particulier afin qu’il puisse poursuivre ses passions. « Il y a très peu de routes ici et tout le monde se déplace en motoneige. Conséquemment, tout point d’intérêt dispose en hiver de son sentier tapé sur lequel on peut rouler en fat », dit-il.

Là-haut, en raison du froid, toute trail devient illico béton et, étonnamment, les précipitations sont minimales. Aussi, les routes se créant entre les villages ont rapidement fait germer dans la tête du pleinairiste l’idée de joindre Kuujjuaq et Tasijuaq en fatbike, un périple d’environ 140 kilomètres jamais parcouru en vélo, qu’il a complété en quatre nuitées. Il nous refile ici quelques trucs de pro glanés sur le terrain.

Du « cyclotourisme » atypique

© Pierre Bouchard

Qu’on soit au-delà du 55e parallèle ou ailleurs, planifier une expédition de bikepacking en hiver nécessite une bonne connaissance de l’itinéraire, de la monture et du camping d’hiver. Malgré son apparence, un vélo à pneus surdimensionnés rencontre rapidement ses limites dans la neige profonde; autant faut-il prendre en considération les aléas de Dame Nature (précipitations, vents, glace, etc.) qui joueront inévitablement des tours, quitte à créer des défis.

Comme dans n’importe quelle expédition, l’imprévisible peut évidemment survenir. Partis pour dormir en abri, Jordan Rémilleux et son acolyte étaient heureux d’avoir pensé à toute éventualité, le refuge de la première nuit n’étant ainsi… tout simplement pas dans les parages. Trimballer une tente fut salvateur.

Aux dires du pilote, la pression des pneus est un facteur à vérifier constamment, et résulte entre le misérable ou l’agréable sur un vélo chargé, avoisinant souvent les 100 lbs (45 kg), le matériel nécessaire en hiver étant plus abondant et volumineux. « Je n’allais pas plus vite, mais l’effort pour tenir le vélo en équilibre et pédaler était plus facile », précise le cycliste, qui ajustait plusieurs fois par jour de l’air dans ses roues.

Ainsi, les essentiels d’un bon kit de bikepacking en hiver devraient comprendre une petite pompe à main, mais aussi un lubrifiant à chaîne supportant des températures très froides et plusieurs gourdes isothermiques (à la fois breuvage réconfortant mais aussi bouillotte dans le sac de couchage).

Entre considérations et planification

© Pierre Bouchard

Si le terrain de jeu hivernal de la Belle Province est quasi illimité, une expédition en fatbike exige, elle, certaines certitudes en matière de terrains, pour être agréable. La surface doit inévitablement être tapée pour une progression roulante et amusante, et on ne peut se balader n’importe où (voir l’encadré). Les dénivelés importants sont un pensez-y bien, considérant le poids d’un fatbike chargé et sa maniabilité subséquente, surtout dans la neige. Le fatpacking d’hiver requiert aussi une logistique bien huilée : aux notions de camping hivernal s’ajoutent celles de l’orientation, de la gestion du froid et des conditions (sentiers, météo) très changeantes. De bons défis, synonymes souvent de dépassement, sont à prévoir.

Dénicher son chemin forestier damé, voire les chemins de traverse d’une réserve faunique avec un fond dur est assez aisé dans notre coin de pays, même en hiver. Des routes secondaires comportent leurs lots de défis; à preuve, Mathieu Beaudoin s’est farci, en 23 jours, une section de la Transtaïga et de la route de la baie James. Bref, votre bled dispose probablement d’opportunités qui sont assez fréquentées (idéalement par des raquetteurs, dameurs par excellence) pour être sillonnées par un fatbike : banquises, cours d’eau figés et autres joyaux accessibles uniquement l’hiver sont à dénicher.

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Par ailleurs, si la surface et le sentier le permettent, toute bécane de cyclotourisme peut éventuellement faire l’affaire. La simple initiative d’entreprendre une nuitée dans l’hiver à vélo risque fort d’être l’étincelle qui engendrera d’autres aventures du genre.

Preuve indéniable de l’expansion de l’expédition hivernale à pédales, les défis hivernaux d’endurance se multiplient. De la deuxième édition de la Laurentides Transfat (qui affichait complet en novembre 2018), épique virée de 30 km dans cet arrière-pays à la Wendigo Ultra (50, 100 ou 155 km) qui sillonnera la vallée d’Ottawa en février 2019, le phénomène de bikepacking d’hiver n’en est vraisemblablement qu’à ses balbutiements.

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Le nouveau projet de Jordan Rémilleux, aussi embryonnaire, projette de relier Puvirnituq à Inukjuaq au printemps 2019, une ballade inédite en fatbike, longeant le littoral de la baie d’Hudson sur près de 200 km au cœur des splendeurs glaciales. Comme quoi rouler dans l’hiver peut rendre givré et… dépendant.

Où rouler en bikepacking au Québec ?

© Pierre Bouchard

Bien que la tentation soit grande, il est interdit d’emprunter (à vélo ou à pied) les sentiers fédérés de motoneige au Québec. Néanmoins, une foule d’autres sentiers sont suffisamment damés pour y rouler en fatbike. Évidemment, il faut prendre en considération les épisodes d’accumulations importantes et préconiser la sécurité entre usagers (visibilité, courtoisie).

Si vous n’êtes pas équipé en camping d’hiver et peu expérimenté en fatbike, sachez que plusieurs refuges se rejoignent en vélo en hiver, moyennant une courte distance. En voici quelques exemples :

Vallée Bras-du-Nord, secteur Shanahan, refuges La Hutte et le Draveur (Québec)
Joignables en fatbike et situés à moins de 2 km de l’accueil dans un sentier facile. valleebrasdunord.com/velo-hebergement-vbn

Club plein air Saint-Donat, refuge Le Branchu (Lanaudière)
À peine 3,5 km séparent le stationnement du refuge à travers un sentier multi-activités généralement tapé. clubpleinairsaint-donat.org/refuges/le-branchu/

Plein air Sutton, refuge rustique (Cantons-de-l’Est)
Le refuge est situé à environ 1 km du stationnement; le sentier y menant est fréquenté, souvent gage de bon fond pour rouler. pleinairsutton.ca/p/refuge.html

5 accessoires indispensables, testés sur le terrain

Bottillons isolés Baffin Camp de base

Cette entreprise ontarienne réputée pour ses bottes offre ces mouflons isolés à semelle renforcée. Un indispensable du camping d’hiver. 59 $ baffin.com

Pneus Terrene Cake Eater Light, 1400-1700g

Nul besoin d’insister : les pneumatiques font la différence. En version cloutée ou non, les Cake Eater Light font honneur à leur appellation : la préhension est étonnante, le poids, minimal. De 120 à 200 $ terennetires.com

Couche de base Smartwool 250 ¼ zip, 285g

Chandail passe-partout en laine mérinos d’une douceur impressionnante, qui agit comme une merveille en gestion de l’humidité et en chaleur. 135 $ smartwool.com

Doudoune Outoor Research Alpine, 538g

Gonflée de duvet catégorisé 800 avec un étonnant pouvoir de compression, ce puffy est aussi compatible avec un casque. À la fois forteresse et fournaise, version poids-plume. 450 $ outdoorresearch.com

Kit Bikepacking Vaude

L’ensemble sac de selle, sac de cadre et sac-guidon à soudures étanches de l’équipementier allemand est franchement bien pensé, en plus d’être abordable et écologique. 120 $ et plus vaude.com