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Les nouvelles maladies du plein air

Depuis quelques années, de nouvelles maladies infectieuses apparaissent. Devrait-on avoir peur de s’aventurer en plein air?

En Amérique du Nord, il existe deux modes de transmission de maladie infectieuse en plein air : les insectes et l’eau. Chez les insectes, ce sont surtout les tiques et les moustiques qui monopolisent l’attention. Au top des préoccupations de santé publique, l’émergence de la maladie de Lyme, causée par la morsure de tiques aux pattes noires. Cet insecte est présent dans les zones boisées : « Depuis 2006-2008, les tiques se sont installées dans le sud du Québec », confie François Milord, médecin-conseil à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). « Toutes les tiques ne sont pas porteuses d’infection, mais l’augmentation du nombre de ces insectes fait nécessairement augmenter le nombre de cas. »

Aux États-Unis, selon les chiffres des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), 300 000 cas de la maladie de Lyme sont recensés chaque année et 40 % des tiques seraient porteuses de la bactérie. Le Québec est aussi touché, mais dans une moindre mesure : de la quinzaine de cas annuels, on est passé à 32, puis 42 et 130 cas respectivement pour les années 2011, 2012, 2013. Environ 15 % des tiques seraient porteuses de la bactérie.

Il est facile de savoir si l’on s’est fait piquer par une tique porteuse de la maladie de Lyme : une importante rougeur apparait autour de la piqure et s’accompagne de symptômes généraux d’infection : fièvre, fatigue ou douleurs musculaires. « En cas de diagnostic dans les 30 jours, un traitement antibiotique est efficace avec presque 100 % de chance de guérison. Mais il est possible que ces symptômes passent totalement inaperçus », prévient le docteur Milord. « Les tiques peuvent piquer à un endroit moins visible, comme derrière le genou. Et, souvent, la rougeur est indolore et ne fait pas souffrir. » Si l’on attend trop avant de la traiter, l’infection peut s’aggraver, attaquer le système nerveux et il sera extrêmement difficile de la combattre par les antibiotiques. Il n’existe encore aucun vaccin pour s’en prémunir.

 

 

Attention durant vos voyages

Seulement 3 % des décès de voyageurs sont dus à une maladie infectieuse, contre 60 % pour les maladies cardiovasculaires et 25 % pour les accidents de la route. Il convient toutefois de bien connaitre les risques et les précautions à prendre.

- Le paludisme / malaria
Se propage par la piqure de certains moustiques (entre le coucher du soleil et le lever du jour).
Symptômes : de type grippal avec maux de tête, douleurs musculaires, frissons, nausées, douleurs abdominales et sensation générale de fatigue.
Zone : dans les régions tropicales et subtropicales, caractérisées par un climat chaud et humide, comme les grandes régions de l'Afrique, Amérique du Sud, certaines parties des Caraïbes, en Asie (Sud et Sud-Est), Europe de l'Est et dans le Pacifique Sud.
Traitement : comprimés.

- La dengue
Maladie virale transmise par un moustique et par transfusion sanguine. Elle peut entrainer une fièvre hémorragique et le décès.
Zone : principalement dans les régions tropicales et subtropicales. Certaines régions de l'Afrique, de l'Amérique centrale, de l'Amérique du Sud, des Caraïbes, de la Méditerranée orientale, de l'Asie du Sud, de l'Asie du Sud-Est et de l'Océanie.
Traitement : aucun pour l'instant.

- La fièvre jaune
Une maladie virale transmise par certains moustiques infectés. Son nom vient du jaunissement de la peau et des yeux survenant quand le virus attaque le foie.
Symptômes : fièvre soudaine, frissons, douleurs articulaires, musculaires et abdominales, nausées, épuisement.
Zone : nombreuses régions tropicales d'Amérique du Sud et d'Afrique.  Traitement : vaccin.

- L’encéphalite à tiques
Maladie virale, transmise par la morsure d’une tique infectée et se manifestant par une inflammation de la zone du cerveau ou de la moelle épinière. Les décès et les séquelles sont extrêmement rares.
Zone : de l’Europe à l’Asie, de l'est de la France jusqu'au nord de la Chine et du Japon et s’étend du nord de la Russie jusqu'en Albanie.
Traitement : aucun traitement spécifique, mais un vaccin existe.

On aurait pu en mentionner d’autres : le choléra, la fièvre typhoïde, la tuberculose, la leishmaniose… Peut importe la destination de voyage, il est fortement recommandé de consulter un médecin, spécialisé en santé-voyage, qui vous informera et vous conseillera (vaccination, comprimés, etc.) en fonction du pays visité, la saison, la durée et du type du séjour.

D’autres infections par les insectes ont aussi été répertoriées, mais elles sont rares et font surtout parler d’elles par la gravité des symptômes plutôt que par le nombre de personnes infectées. Parmi les cas les plus médiatisés, citons notamment celui de la tique Lone Star qui développe une réaction allergique sévère à la viande rouge et dont la Virginia Commonwealth University (VCU), responsable de son étude, a recensé quelque 1 000 infections.

Facteurs d’apparition au Québec

Plusieurs facteurs expliquent l’apparition de ces maladies infectieuses au Québec. D’abord, les changements climatiques, car ces insectes peuvent maintenant survivre à des latitudes plus nordiques. C’est notamment le cas du virus du Nil occidental, transmis par une piqure de moustique ou de la maladie de Lyme que l’on observe dorénavant au Québec. « Plus la saison chaude est longue, plus il y a de risques que la tique pique, indique François Milord. Si la saison chaude est courte, elles mourront car elles ne seront pas capables de compléter leur cycle de vie. »

La mondialisation des échanges et l’augmentation des voyages internationaux, touristiques ou commerciaux, favorisent également la transmission de nouveaux virus. « Le virus du Nil occidental s’est propagé grâce aux voyageurs », explique le docteur Dominique Trempe, directeur de la Clinique santé voyage de Montréal. « Apparu d’abord dans les milieux tropicaux, il y a eu plusieurs cas, en 1999, dans la baie de New York. » Depuis, le virus s’est étendu partout aux États-Unis et est maintenant présent au Canada, dans le sud des provinces. Une présence plus vaste que la maladie de Lyme, mais avec moins de cas. Au Québec, l’infection est apparue en 2002. Elle a touché 42 personnes en 2011, 133 en 2012 et 30 en 2013. Si 80 % des personnes piquées ne développent aucun symptôme, les 20 % restants auront des signes s’apparentant à la grippe : maux de tête, de fièvre et parfois douleurs musculaires. Dans une minorité de cas (une personne sur 150), ce virus peut infecter le système nerveux, en s’attaquant aux méninges et au cerveau. Il n’existe aucun traitement spécifique ni de médicament ou de vaccin.

Comment se protéger?

Comme l’affirme François Milord : « Notre défi est d’informer le grand public pour prévenir les risques. » Alors quelles sont les précautions à prendre? Porter des vêtements longs, dormir sous une moustiquaire la nuit, appliquer de l’insectifuge sur sa peau, avec des produits à base de DEET, d’icaridine ou d’huile d’eucalyptus. « Plus agressifs et plus difficiles d’accès au Québec et au Canada, il existe aussi des insecticides à vaporiser uniquement sur les tissus, et non la peau, comme la perméthrine », conseille le Dominique Trempe.

« On ne veut pas décourager les gens de faire des activités dehors, mais les inciter à être prudents et à adopter des mesures simples », observe François Milord. « Contre les tiques, il est important de bien s’examiner après une randonnée dans un milieu à risque. Si l'on a été piqué, il faut enlever la tique adéquatement, tout le corps et surtout le dard, car si on l’écrase, on peut favoriser le transfert de la bactérie. Une tique infectée met entre 36 à 48 heures pour transmettre la bactérie, donc si elle est retirée la même journée, il n'y aura pas de transmission. » Dominique Trempe recommande même, une fois retirée, de la mettre dans un bocal et l’apporter à votre médecin pour analyse au laboratoire de santé publique afin de déterminer si elle est porteuse de la bactérie.

L’eau, source de problèmes pour notre corps?

Les insectes ne sont pas les seuls responsables des maladies infectieuses dans un contexte de plein air. L’eau véhicule aussi un certain nombre de bactéries et de microbes nocifs. « C’est une idée fausse, largement répandue, que l’eau de n’importe lac ou rivière est potable. Ce n’est pas tout le temps le cas », assure Dominique Trempe. Denis Govin, biologiste conseiller scientifique à l’INSPQ, est du même avis : « Consommer de l’eau en nature n’est pas sans risque. Ce n’est pas parce qu’elle est limpide ou qu’elle descend des montagnes qu’elle est bonne à boire. Faute de traitement, on risque l’infection. Les plus fréquentes sont liées à la gastro-entérite, aux diarrhées, ou l'hépatite A. Certaines populations sont plus vulnérables, comme les enfants, mais surtout les personnes âgées, avec un système immunitaire affaibli. »

Pour éliminer microbes, bactéries et virus, il est nécessaire de désinfecter l’eau prélevée dans la nature. Le docteur Dominique Trempe recommande plusieurs méthodes : « La meilleure est de faire bouillir l’eau. La majorité des microbes meurent avant l’ébullition. Il existe aussi la désinfection chimique, avec de la pristine ou l’iode (même si cela donne un gout). Enfin, il y a les filtres, dont la majorité est efficace contre les microbes et les bactéries, mais pas les virus. Difficile de s’y retrouver avec leur nombre important sur le marché. »

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