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  • Plaza de Armas, Lima © Christian Vinces / Shutterstock

Solidarité avec les Péruviens

Notre collaboratrice Nathalie Schneider, qui devait quitter pour le Pérou ce week-end dans le cadre du Défi Blogueurs d'Explorations en terres solidaires de Village Monde, s'envolera finalement pour la Bolivie. Elle a toutefois fait une étape à Lima afin d'aider la population locale qui souffre suite aux inondations torrentielles de la semaine dernière. Voici son récit :

Ce matin, nous sommes arrivés à 7 h tapantes devant la grille du Palacio de Gobernio de Lima, Plaza de Armas. La veille, le militaire en faction nous avait prévenus : premier arrivé, premier servi; si vous voulez aider la population, il faut arriver tôt. Il avait plutôt l’air amusé de nous voir offrir notre aide, ce jeune militaire, à entendre nos notions d’espagnol si rudimentaires…

Le lendemain, on a glissé le nez entre les grilles du palais gouvernemental : une bonne cinquantaine de soldats en treillis finissaient d’installer des tables de fortune dans la cour du palais avant de laisser entrer les bénévoles : on était bien une cinquantaine en file indienne.

Aussitôt, Jonathan Custeau et moi avons été assignés à la répartition du riz. Notre tache consistait à fractionner les grandes poches en portions d’un kilo, tandis que d’autres divisaient les portions de lentilles vertes ou les rouleaux de papier hygiénique. Avec les autres bénévoles de notre groupe, surtout des femmes, ça n’a pas pris de temps : les sourires se sont vite échangés, puis les prénoms, les photos et, enfin, les patronymes Facebook. La cour du siège présidentiel est devenue, le temps de le dire, un grand marché coloré avec des étals d’huile végétale et de boites de thon sur lesquelles les donateurs avaient écrit, à l’encre indélébile, de petits messages d’espoir… Nous sommes de tout cœur avec vous… 400 tonnes d’espoir, selon l’estimation des militaires en charge de la distribution. 

Plaza de armas © Nathalie Schneider

Les camions arrivaient avec des victuailles et des vêtements, des gallons d’eau et des jouets d’enfants avec une régularité d’horloge. Toute la solidarité et l’empathie du peuple de Lima, que de mauvaises langues taxent parfois d’individualiste, coulaient en flot continu après la diffusion dans les médias de la tragédie qui frappe le pays : une centaine de morts, 100 000 sinistrés, près de 200 ponts partis avec les vagues de boue des récentes inondations. Il faudra des années avant que des milliers de villageois retrouvent une vie normale. Un regrettable coup du sort dans un contexte social déjà si inéquitable. 

Ce matin-là, Nancy Ann Lange, celle que tous les Péruviens appellent «la Primera Dama», passait entre les tables et les rangées de victuailles avec des sourires et des brassées d’encouragement. En apprenant que nous étions des journalistes canadiens, elle a étiré un peu plus longtemps sa visite à notre table. «Je n’aime pas qu’on m’appelle comme ça, Primera Dama, je préfère qu’on me voie comme une femme qui aime aider les autres. Je suis très impressionnée par la mobilisation populaire», nous a dit l’épouse du président en poste, Pedro Pablo Kuczynski. Ce matin-là, c’était un peu comme si Nancy ouvrait toutes grandes les portes sa maison pour y laisser entrer «son» peuple, le temps d’un réconfort collectif.

La fanfare militaire s’est postée sur les marches du palais, et l’ambiance a pris un petit air de fiesta improvisée jusqu’à l’hymne national que chacun a écouté, immobile, la main sur le cœur.  

Plaza de armas © Nathalie Schneider

L’un des responsables des bénévoles, le sergent Alexandro Hino Josa, son cellulaire à l’oreille, nous a demandé de le suivre. Une visite privée nous attendait : celle des luxueux salons du palais présidentiel. 

Tandis que la fanfare jouait toujours, nous avons déambulé, quasi silencieux, dans le grand salon doré, une salle d’apparat décorée à la feuille d’or, et devant le tableau colossal de Tupak Amaru, le héro de la rébellion inca, exécuté par les Espagnols, et dont le buste de bronze surveille l’entrée du salon officiel. 

Émouvant, à l‘image de cette journée peu ordinaire, débordant d’empathie et de paradoxes. 

L’auteure remercie Village monde, le programme Uniterra du CECI, la Fondation Air Canada pour leur aide précieuse à la réalisation de ce reportage.

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