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  • Crédit: Fred Buyle

William Winram : l’apnéiste qui danse avec les requins

William Winram a deux passions dans la vie : l’apnée et les requins. Ancien champion du monde d’apnée en eau profonde et plusieurs fois recordman panaméricain, ce grand blond originaire de Vancouver tire profit de ses qualités de plongeurs pour nager et étudier en toute liberté ces poissons à la si mauvaise réputation. Conscient des menaces qui planent sur leur avenir, c’est tout naturellement qu’il soutient avec force le projet de loi C-380 visant à interdire l’importation des nageoires de requin au Canada.

Pourquoi soutenez-vous le projet de loi C-380?
Je sais, par le biais de mes travaux avec la communauté scientifique, combien la situation concernant la population des requins est catastrophique. Si ce prédateur disparaît, c’est tout l’écosystème marin qui en sera perturbé. Le calamar, la proie principale du requin, va proliférer et va manger plus de poissons. Très rapidement, il n’y aura plus de poissons. Actuellement, 25 % de notre alimentation en protéines proviennent de la mer. Si nous perdons cette ressource, quel sera le résultat? Une aggravation de la pression alimentaire pour l’Homme, déjà très forte avec le problème de la surpêche. De plus, ce que les pêcheurs infligent au requin est inutile et cruel : l’animal rejeté à l’eau sans ses nageoires suffoque et se noie.

Quels sont les principaux obstacles à l’adoption de cette loi?
En Californie, un projet similaire avait été proposé, mais le lobby de la pêche a tout fait pour l’empêcher. Le marché des ailerons de requins génère beaucoup de revenus, car c’est un animal relativement facile à attraper. Les profits sont énormes : environ 400 millions de dollars par année. Mais, si on commence à prendre toutes nos décisions en fonction des intérêts économiques, on va droit dans le mur. Le réchauffement climatique occasionne des effets désastreux sur l’environnement et sur les océans. La société civile semble heureusement plus concernée par la protection des requins. Il est très important que les gens mettent la pression sur leurs représentants.

D’où vous vient cette passion pour les requins?
Quand j’étais petit, ma mère m’a donné un livre de photographies sous-marines. J’ai tout de suite été fasciné par cet animal. À l’école, je choisissais toujours cet animal pour les projets scientifiques. La plupart préfèrent les dauphins ou les baleines. Moi, c’était les requins. J’aime leur grande honnêteté. Contrairement aux humains, ils le sont toujours.

Comment expliquer que les requins aient une si mauvaise image?
En partie à cause de la série de films Les Dents de la mer (Jaws). Il est très efficace, car il joue sur la peur de l’invisible, sur ce qui se cache sous la surface de l’eau. Les gens ont forcément peur de ce qu’ils ne peuvent pas voir. La mer est anxiogène, car on y contrôle moins de choses que sur terre. Ensuite, les médias ont propagé cette fausse image du requin mangeur d’hommes. Pourtant, un requin est potentiellement moins dangereux qu’un prédateur terrestre. Si tu t’approches d’un lion par exemple, tu as de grands risques de te faire attaquer. Le requin est curieux : avant d’attaquer, il juge et évalue. Pour l’approcher sans danger, il faut juste se calmer, se relaxer. Si tu paniques, l’animal passe de l’état de curiosité à celui de prédateur, car vous agissez comme une proie. Cela fait 20 ans que je nage auprès des requins et je ne me suis jamais fait attaquer, car de la manière dont je les observe, ils ne sont pas agressifs.

Quelles sensations ressentez-vous quand vous nagez avec les requins?
C’est difficile à décrire. Je ne connais rien de comparable. C’est un moment rare et exceptionnel, qui n’arrive qu’une seule fois tous les deux, trois ans, une expérience hallucinante dont il est difficile de se remettre, de revenir à la réalité. Je me souviens qu’une personne qui m’accompagnait pendant une expédition m’a dit alors que deux requins blancs nageaient autour de notre bateau : « C’est comme regarder National Geographic, sauf que l’on est dedans! » Nager avec un requin, c’est exactement la même situation qu’un jeune homme nerveux qui croiserait une très belle femme. Or, c’est souvent la fille qui prend les dispositions, car nous les hommes, on ne sait pas quoi faire et on panique. Le requin, c’est cette fille qui décide si l’on peut ou non se rapprocher!

Quels sont vous futurs projets?
J’essaye de trouver des financements pour aider les scientifiques dans leurs recherches sur les requins, pour acheter des balises et des récepteurs. J’ai aussi besoin d’argent pour réaliser des documentaires pédagogiques pour le grand public. Cette année, j’organise une expédition autour du grand requin blanc et j’invite les gens qui le veulent à se joindre à nous. Ils pourront plonger dans une cage, nous observer travailler au marquage des requins, apprendre et s’éduquer sur cet animal.

Et les compétitions d’apnée?
J’aimerais trouver le temps pour battre le record du monde d’apnée en poids constant sans palmes (101 mètres). Depuis 2008, je manque de temps pour pouvoir réellement m’entraîner, mais je sais que j’en suis capable. En 2009, je suis arrivé aux Championnats du monde avec seulement 10 jours d’entrainement et j’ai terminé deuxième avec un nouveau record nord-américain. Celui qui a gagné a fait quatre mètres de plus avec huit mois de préparation!

Encore plus
williamwinram.com

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