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  • Crédit: courtoisie Rêve de glace

Rêve de Glace : 60 jours en kayak de mer dans l’Arctique canadien

En janvier 2013, nous avions réalisé une entrevue avec Sébastien Lapierre, pompier professionnel à Québec, qui se préparait à partir, avec Olivier Giasson, dans l’Arctique Canadien. Le défi était de taille : parcourir 3 500 km en 80 jours et en kayak de mer sur le mythique passage du Nord-Ouest, avant que la glace ne vienne reprendre possession de son royaume, et être ainsi les premiers kayakistes à en compléter la traversée. Parti le 15 juillet de Tuktoyaktuk, les deux explorateurs ont dû arrêter leur expédition à Gjoa Haven, 60 jours plus tard, bloqué par les glaces qui ont fait leur retour plus rapidement que prévu. Sébastien Lapierre fait le bilan de son Rêve de Glace 2013.

Quelques jours après être rentré de votre expédition, comment vous sentez-vous après 60 jours en Arctique ?

Ça va bien. Physiquement, j’ai encore quelques traces du voyage : les doigts engourdis par le gel, des petites douleurs dûes aux mouvements répétitifs du kayak. Mentalement, je me remets tranquillement dans le bain. J’avoue que c’était un peu angoissant au début : le trafic, faire son épicerie, les tracas de la vie quotidienne… Je n’étais plus habitué. Hier, avec Olivier, on a regardé les images filmées pendant le voyage. On a pris conscience, avec un peu de nostalgie, de ce que l’on avait accompli après trois ans de préparation.

Crédit: courtoisie Rêve de glaceÉtait-ce plus difficile que vous ne l’imaginiez ?

Oui, particulièrement en 2013. Ce fut l’été le plus froid depuis très longtemps. Le retour des glaces s’est fait très rapidement. Sur une partie de notre itinéraire, il n’a jamais dégelé. Cela a joué sur notre moral et sur notre énergie. C’était stressant, comme une course contre la montre. À tout moment, on pouvait rencontrer la glace. C’est arrivé à une équipe en jet-ski : ils se sont couchés le soir et le lendemain, ils étaient entourés de glaces. On avait aussi sous-estimé le vent omniprésent, qui a soufflé tous les jours. De dos ou de face, cela gênait notre progression.

Avant de partir, vous nous disiez qu’« embarquer dans ce genre d’aventure demande de l’imagination pour faire face à toutes sortes de problématiques et d’imprévues ». Quelles ont les événements imprévus du voyage ?

Il a fallu s’adapter aux réalités du terrain. Des hauts fonds et des petites iles n’apparaissent pas sur la carte ou le GPS. Improviser dans notre navigation fut un défi récurrent. Il a également fallu gérer le froid. C’était très pénible, surtout dans les dernières semaines. On a subi une tempête Arctique qui nous a obligé à changer notre itinéraire : débarquer et porter le kayak pour passer une montagne. Improviser en expédition, cela consiste à prendre le mauvais côté des choses qui vous arrivent et les retourner à son avantage pour en faire quelque chose de positif.

Vous avez quand même dû voir des choses qui vous ont enthousiasmées.

À chaque jour du voyage, on se disait qu’il fallait apprécier le moment présent, admirer les paysages magnifiques qui s’offraient à nous, On a assisté à des couchers et des levers de soleil exceptionnels, comme on ne voit pas à Montréal. Ce qui nous a impressionnés, c’est comment le climat et la météo peuvent changer en un rien de temps : une mer d’huile qui devient d’un coup très remuante. L’Arctique est vraiment un monde unique et particulier, un monde plat où l’on peut quasiment voir à 360 degrés.

Crédit: courtoisie Rêve de glaceLe but de cette expédition était aussi d’aller à la rencontre des Inuits. Qu’est-ce que vous avez pu apprendre sur eux ?

Nous avons été agréablement surpris par l’accueil. C’est un peuple très généreux. À chaque village où nous arrêtions, il était facile de voir que nous étions des étrangers. Le contact était très facile. Durant le trajet, il nous est arrivé plusieurs fois de partager le repas avec des marins ou des pêcheurs. Entre eux, ils communiquent grâce à des radios amateurs. Tout le monde était donc au courant qu’un kayak jaune s’en venait vers eux. Ils voulaient que l’on s’arrête dans tous les villages. Ça n’a toutefois pas été possible à chaque fois.

Avez-vous pu observer les effets des changements climatiques ?

Pas vraiment. Ça a été même tout le contraire. Ce fut une période exceptionnellement froide pour la saison. Mais, on a pu en parler avec les populations locales qui, elles, ressentent concrètement ces changements depuis plusieurs années. Notamment pour la chasse et la pêche. Ce n’est pas un problème de raréfaction qui en est jeu, mais plutôt une faune et une flore en plein bouleversement : des animaux qu’ils ne voyaient pas, des changements de comportement, comme, par exemple, des ours qui s’aventurent de plus en plus dans les villages…

Quelle suite allez-vous donner à cette expédition ?

On a beaucoup filmé durant le voyage. En regardant tout ça, on a toujours l’envie d’en faire quelque chose pour le montrer au grand public. Pourquoi pas un documentaire.

Un autre Rêve de Glace est-il déjà en projet ?

Une fois que l’on a gouté à L’Arctique, c’est difficile de s’en passer ! Le désir d’y repartir est intact. Mais cela prend du temps de préparer une telle expédition. Je ne pense pas y retourner avant 2015.

L'une des capsules vidéos tournée durant l’expédition et publiée sur le site web Rêve de Glace :

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