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  • Crédit : Association des scouts du Canada

Scoutisme : l'école du plein air

Le scoutisme se targue d’être le plus grand mouvement de jeunesse au monde, avec plus de 28 millions membres, jeunes ou adultes, répartis dans 160 pays. Pourtant, c’est une organisation mal connue, réduite à quelques clichés tenaces, celui du jeune scout, habillé d’un short et d’une chemise kaki parsemée de badges cousus, d’un foulard noué autour du cou, coiffé d’un chapeau à larges bords, et qui n’a qu’une idée en tête : aider à faire les traverser les personnes âgées aux feux rouges. Aujourd’hui, qu’en est-il réellement du scoutisme?

Le scoutisme à l'ère moderne

Domaine Richelieu, dans les Laurentides. L’une des bases de plein air des Scouts du Grand Montréal. Située à Saint-Adolphe-d’Howard, la base accueille, surtout pendant la saison estivale, plusieurs groupes de scouts des environs de Montréal, qui y viennent pratiquer les nombreuses activités de plein air possibles sur le site.

La liste est longue : du canot et du kayak sur un lac dénué de véritables courants – idéal donc pour s’initier à ces embarcations dans un environnement sécuritaire –, de la baignade, de l’escalade sur parois naturelles d’une dizaine de mètres de haut, du tir à l’arc, de l’hébertisme, de la randonnée pédestre sur un sentier écologique, de la course d’orientation, des ateliers de constructions de radeaux et de cabanes, de l’astronomie par l’observation des étoiles...

Un beau terrain de jeu boisé, proche des lacs, qui dispose de sept chalets, comme autant de sections indépendantes pour chaque groupe scout, avec toutes les installations permettant de les accueillir au mieux : dortoir, cuisine, douches et salle de bains. Il est aussi possible de se la jouer plus rustique en choisissant la formule camping pour apprécier davantage la nature environnante et sa quiétude nocturne. Le camp est géré par une équipe d’animateurs, des jeunes entre 16 et 21 ans pour la plupart, eux aussi scouts et qui ont gravi les différents échelons du scoutisme, avant de devenir à leur tour des membres du personnel encadrant les plus jeunes dans la bonne marche et l’animation des divers ateliers. L’organisation permet ainsi à des jeunes de 16 à 25 ans de suivre des formations d’animateurs de scouts et de camps, théoriques et pratiques, pendant 38 heures, lesquelles constituent une première expérience forcément intéressante pour ceux qui se destinent plus tard à des métiers nécessitant de l’animation et de l’encadrement.

Formation pratique

Mais les scouts, c’est un mouvement qui ne se contente pas de vivre le plein air de manière sédentarisée. Il laisse la possibilité à ces jeunes de s’aventurer dans la nature sauvage, à la recherche de nouvelles sensations et aussi d’un peu d’eux-mêmes. Un groupe mixte de onze scouts de Sept-Îles, âgés de 14 et 18 ans, sont ainsi partis en expédition dans les monts Groulx, près du lac Manicouagan, dans la région de la Côte-Nord, après une formation spéciale (secourisme, lecture des cartes, utilisation de la boussole) et une préparation physique intense de quatre mois, à raison de trois fois par semaine. Accompagnés d’un ancien guide de la région, ils ont traversé en sept jours ce massif montagneux pour tirer profit de ce que pouvait offrir cette nature sauvage : chercher de l’eau potable et trouver de la nourriture. Une aventure extrême dont on sort forcément grandit, des souvenirs de paysages et de décors extraordinaires plein la tête, qui sortent de l’ordinaire, comme voir un panorama avec sept arcs-en-ciel en même temps, sans oublier l’observation de la faune! Mais c’est également des maux de dos, des ampoules et des piqûres de moustiques!

Le mouvement scout va plus loin qu’une simple offre de loisir. « Le scoutisme a pour mission de contribuer à l'éducation des jeunes afin de participer à la construction d'un monde meilleur, peuplé de personnes épanouies, prêtes à jouer un rôle constructif dans la société », peut-on lire sur le site internet de l’Organisation mondiale du scoutisme. Un peu idéaliste? Sûrement, mais revendiqué haut et fort, comme principe de base de l’organisation d’où découle toute une série de valeurs inculquées aux jeunes scouts : universalité, paix, ouverture et respect de l'environnement et de l’autre. Le scoutisme est donc un mouvement d’éducation non formel, un peu à mi-chemin entre l’école et les parents, qui veut développer les aptitudes physiques, intellectuelles et sociales des jeunes qu’il a en charge. Une éducation qui passe par le respect de règles, englobées dans la « loi scoute », un code éthique qui constitue en quelque sorte l’idéal de vie et de comportement que tout et chacun doit suivre. Chaque branche d’âge a ainsi sa propre loi, qui correspond aux objectifs pédagogiques et aux compétences que doivent acquérir l’enfant ou l’adolescent. Par exemple, pour les Castors (7à 8 ans), la loi veut que « le Castor joue avec et comme les autres ». Même corrélation entre loi et apprentissage pour les autres classes d’âges : les Louveteaux et les Exploratrices (9 à 11 ans), les Éclaireurs et les Intrépides (11 à 14 ans), les Pionniers (14 à 17 ans) et les Jeunes adultes (17 à 25 ans).

Apprentissage multidisciplinaire

À la différence de l’école, les jeunes participent à toutes les étapes de l’organisation des activités, même si leur degré d’implication varie en fonction des âges. « Plus ils avancent en âge, plus ils gagnent en responsabilités », explique Marie-Héléne Giguère, adjointe au commissaire national à l’Association des scouts du Canada. « Cela passe par la préparation complète, du début à la fin, que ce soit une activité ou un événement. Par exemple, un groupe de la Rive-Sud de Québec a décidé d’organiser un grand tournoi de volleyball qui réunit 400 scouts chaque année. Cela a demandé beaucoup de travail et de problèmes à résoudre : l’hébergement, la location des gymnases, les repas, la gestion du budget, l’animation et le site internet ». 

Le mot d’ordre est d’apprendre tout en s’amusant et en développant des compétences très diverses : le travail d’équipe, la débrouillardise et l’improvisation face aux imprévus, l’ouverture d’esprit, etc. « Pour qu’ils s’accomplissent pleinement comme futurs adultes et citoyens », résume Marie-Hélène Giguère. Preuve en est, deux jeunes scouts d’une vingtaine d’années se sont rendus, en juin dernier au Sommet de la Terre Rio+20, la conférence des Nations Unies sur le développement durable, à Rio de Janeiro, pour travailler et discuter autour de la thématique « Un monde meilleur ».

En 2013, les scouts fêtaient leurs 105 ans d’existence sur le sol canadien, un mouvement établi en 1908, un an après sa fondation par Lord Baden-Powel, un ancien général britannique. Le scoutisme est représenté au Canada par deux organisations. D’un côté, l’Association des scouts du Canada, mouvement francophone – avec ses bureaux situés à Montréal – qui compte 17 000 membres au Québec et qui bénéficie d’une grande autonomie de gestion, que ce soit pour fixer le budget annuel, le montant de la cotisation (en moyenne entre 70 et 200 $ annuellement) et leurs règlements. De l’autre, Scout Canada, plus anglophone avec au-dessus de 100 000 membres partout dans le pays avec un siège social basé à Ottawa. Une anomalie au regard des règles de la maison mère, qui ne reconnait habituellement qu’une seule organisation par pays. Y aurait-il un conflit fratricide sur fond de différence linguistique? Pas vraiment : les deux associations ont signé un protocole d’entente, leur permettant, notamment à travers un comité de coopération, de s’échanger des informations sur les programmes pédagogiques, d’agir de concert pour les questions internationales, de monter des projets en commun, comme ce fut le cas pour les collectes de fonds avec le groupe de distribution américain Sears.

Une entreprise religieuse?

D’origine protestante, le scoutisme canadien s’est depuis affranchi de toutes obligations religieuses, pour devenir un mouvement laïque et multiconfessionnel, où toutes les religions sont acceptées et représentées. « Si le mouvement scout a une origine chrétienne, cet aspect historique est moins présent aujourd’hui, tout simplement parce qu’elle est moins présente dans la société québécoise », indique l’adjointe au chef de camp du domaine Richelieu, Wazabi (son nom scout). Il reste quelques références religieuses, comme pour les bénédicités, mais c’est plus de l’ordre de la tradition, comme une formule rituelle de politesse avant les repas. »

Un mouvement qui, s’il s’est éloigné des considérations religieuses, a gardé au rang de ses traditions, ses rites de passage. Au même titre que l’école a ses examens, le scoutisme a aussi ses étapes, marquant l’évolution du jeune scout. Plusieurs rites rythment la progression du scout. Au premier rang : la promesse du scout, l’engagement que prend le jeune auprès des autres membres de respecter la loi scoute et ses valeurs. Moins répandu, car pas obligatoire et ne faisant pas partie du programme officiel de l’Association des scouts du Canada, le rituel de la totémisation est une sorte de baptême scout où le groupe va se réunir pour se donner un nom d’animal, d’un végétal ou d’un élément de la nature, suivi d’une qualité qui représente le mieux le caractère du jeune. Oubliez les François, Marc ou Julie, dites plutôt bonjour à « Orignal modéré », « Rosée prévenante », « Renard fiable » ou « Lynx enjoué », en faisant le salut scout : main droite levée, l’index, le majeur et l’annulaire pointés vers le haut, le pouce sur l’auriculaire recourbé! Le scoutisme a beau vouloir faire sa révolution ou continuer son évolution, il y a des choses qui ne changent pas. Et c’est ce qui en fait tout son charme!

 


Québec, centre du scoutisme mondial en 2013

Après la Suisse, le Mexique, Taïwan et le Kenya, l’Organisation mondiale du scoutisme a choisi le Canada comme pays hôte du quatorzième Moot Mondial. Un « Moot » est un rassemblement international des scouts, âgés de 18 à 25 ans. Cet événement s'est déroulé pour la première fois au Canada et a réuni, du 8 au 18 août 2013, près de 5 000 jeunes venus du monde entier.

Le centre névralgique des festivités s'est situé sur une base scoute au Québec, le camp Awacamenj Mino (qui signifie « mieux que le mieux » en algonquin), à 75 kilomètres au nord d’Ottawa-Gatineau. Chaque participant devait choisir une thématique, une « route », dont découlaient plusieurs activités en lien avec le thème choisi : la route Vie centrée autour de l’aide de son prochain, la route Écoresponsable basée sur le respect de l’environnement, la route Culture concentrée sur l’identité des peuples, et enfin la route Aventure dédiée au dépassement de soi, physique et psychologique.

Une partie du programme s'est également déroulée dans les grands centres urbains de l’Est canadien : Montréal, Québec et Toronto, où les scouts pourront participer à des « chantiers », en prêtant main-forte aux organismes locaux. Une belle occasion pour les scouts canadiens de rencontrer et d’échanger avec leurs homologues étrangers.

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