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Un tour du monde en mode minimaliste

Expert mondialement connu en techniques de survie, le Saguenéen André-François Bourbeau vient de compléter un périple de 100 jours autour du globe, en mode minimaliste. Survol des points forts de son cette grande aventure.

Une idée approximative de la date de retour, un sac de sept kilos et quelques règles inusitées à suivre pour tracer l’itinéraire au fur et à mesure… Tant qu’à s’offrir un tour de la planète, André-François Bourbeau n’allait pas faire les choses comme tout le monde.

Rien d’étonnant pour ceux qui connaissent ce professeur à la retraite — il enseignait en profil plein air —, aussi sommité de la survie en forêt et des techniques ancestrales. Tout est bon pour pimenter une aventure, avec André-François!

C’est son ami de longue date, James Derasp, qui souhaitait d’abord aller avec lui au Sri Lanka. Loin d’être charmé par le long voyage à faire, André-François a plutôt suggéré une façon de voyager. « Il faut faire ça en petits bouts pour que ce soit moins pénible ! » a-t-il lancé à James.


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À l’Ouest, que du nouveau

© Courtoisie André-François Bourbeau

D’abord, toujours voyager vers l’Ouest. Une façon de ne pas subir les effets du décalage horaire, explique « AFB ». Et tant qu’à être parti à l’autre bout du monde… aussi bien continuer et en faire le tour!

Quant aux destinations, « on les a trouvées en suivant l’isotherme de 22 degrés », raconte l’aventurier. En clair? En Amérique, en Asie et en Europe, les voyageurs orientent autant que possible leurs déplacements en suivant cette ligne fictive de température constante. « Je ne voulais pas qu’il fasse trop chaud, ni trop froid », résume-t-il.

En compagnie de James et d’un autre copain, Marcel Savoie, le sexagénaire s’est ainsi retrouvé à Vancouver pour s’envoler ensuite vers Hawaii, puis vers le Japon. Par la suite, tout a été improvisé, en suivant la courbe de température et selon les billets d’avion disponibles. Après Taïwan, Marcel a rebroussé chemin, comme prévu, tandis que James et André-François partaient pour la Malaisie.

« On voyageait pas cher. On s’était donné comme défi de faire le tour du monde avec environ 5 000 $ [chacun] », raconte André-François. Un budget serré qui ne permettait pas trop de folies, mais qui n’a rien enlevé au plaisir des globe-trotteurs. En tout, André-François estime avoir effectué plus de 1 000 km de rando — leur activité de prédilection — à travers les 14 pays visités. Une grande mobilité sur la route rendue possible par l’utilisation de petits sacs à dos — à peine 7 kg pour celui d’AFP — contenant néanmoins tout le matériel de camping. « Sinon tu paies un supplément; avec 15 lb, tu n’as jamais à t’inquiéter pour ton sac et tu n’as pas à envoyer de bagage en soute. »


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On n’est jamais si bien servi…

© Courtoisie André-François Bourbeau

Fidèle à sa réputation, le maître de la survie avait pensé à tout… quitte à en fabriquer des bouts lui-même pour avoir ce dont il avait besoin. Tout était dans la simplicité et la polyvalence. Il a ainsi confectionné lui-même sa tente, avec une bâche et un abri moustiquaire. Conçue pour servir de voile au besoin, la toile de la tente aura notamment été utile au Népal, où le mordu de navigation a fait tourner bien des têtes avec des modifications apportées à une barque… pour la transformer en petit voilier. « Les Népalais trouvaient qu’il y avait des touristes bizarres, là! »

AFB s’est aussi fabriqué un « couteau » en silex « qui passe sur l’avion ». « Je lui ai donné la forme d’une roche, disons… ». Un subterfuge efficace, car le silex taillé n’aura jamais inquiété aux nombreuses frontières traversées. « Si quelqu’un posait une question, je disais que ma fille collectionne les roches. »

Bien de son temps malgré son amour pour les techniques ancestrales, André-François a aussi tiré profit d’objets bien modernes, comme son Therm-a-Rest NeoAir poids plume, et son précieux iPad mini, avec lequel il a partagé son périple sur Facebook en temps réel.

Ce « gourmand de la pire espèce » aura aussi cherché à goûter à tout, quitte à ne pas trop savoir ce que c’est. Ou sinon à le regretter… un petit peu du moins. Comme cette tentative de manger du durian, un fruit qui pue horriblement. « Tu le sens de l’autre bord de la rue! », décrit le voyageur au sujet de cet aliment interdit en public à certains endroits. Heureusement, d’autres découvertes ont été plus réussies, comme ce curry aux mangues servi en Thaïlande ou encore ces charcuteries dégustées en Hongrie. Et toujours sans problèmes de santé : André-François aura respecté à la lettre sa règle d’or : « Boil it, cook it, peel it or forget it ».

Après 100 jours à explorer la planète de la sorte, son coup de cœur demeure sans conteste le Japon : « Pour moi, c’est la place la plus capotée sur la Terre, avec un peuple tellement différent des autres et une culture totalement unique! »

De retour chez lui après ce qu’il appelle son « petit tour du monde », André-François se trouve bien chanceux de retrouver la tranquillité de son coin de pays. « On est du bon bord de la planète. C’est de l’autre bord qu’il y a trop de monde : ça n’a pas de bon sens, les gens sont tassés, tassés… »

Malgré la magie et la beauté de tout ce qu’il a vu, AFP reste frappé par la pollution, le bruit et le trafic motorisé dans plusieurs villes. Il souligne les marées de scooters du Népal et les détritus qui jonchent les plages de Turquie. Sans oublier l’achalandage monstre, en camping comme en randonnée, en Asie. À Taïwan, jusqu’à 2 000 personnes se retrouvaient parfois à faire la même excursion. « Tellement que tu n’es pas capable de marcher à la vitesse que tu veux », assure André-François. « Après ça, t’arrives à la maison […], et il passe un char aux demi-heures dans ta rue. Tabarouette qu’on est bien! »


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5 aventures dignes de mention

© Courtoisie André-François Bourbeau

1- Planche à pagaie, Hawaii

À défaut de défier les redoutables pipelines hawaïens, AFB s’est essayé à la planche à pagaie dans des vagues plus accessibles du Pacifique. Après tout, c’est cette activité ancestrale polynésienne qui est à l’origine du surf.

2- Randonnée sur les sentiers du Kumano Kodo, Japon

Le froid, la neige et la démesure : tout était au rendez-vous sur ces anciennes routes de pèlerinage. Équipé très sommairement pour quatre jours de rando, le trio a composé avec une météo capricieuse pour fouler ces sentiers légendaires classés au patrimoine mondial de l’UNESCO.

3- Voile sur le lac Phewa, Népal

Adepte de voiliers format poche qu’il fabrique lui-même, André-François ne pouvait se contenter de ramer simplement dans une barque sur le deuxième plus grand lac népalais. Après avoir remercié leur guide et transformé l’embarcation louée en véritable voilier, James et lui ont apprécié en relaxant le panorama de l’Annapurna à l’horizon.

4- Tour du lac Balaton à vélo, Hongrie

Plus grand lac d’Europe centrale, le Balaton fait 78 km de long et 15 km à son point le plus large. Nos voyageurs se sont tapé une excursion à vélo de quelques jours en bikepacking minimaliste… sur une monture de ville à une seule vitesse!

5- Randonnée à Cabo da Roca, Portugal

Entre mer et montagnes, la découverte du relief accidenté et des plages enclavées de la côte du Portugal a ravi AFP : « Pour moi, c’est le plus féérique de tous les bords de mer que nous avons parcourus durant notre voyage. » Les falaises de Cabo da Roca, situées à une quarantaine de kilomètres de Lisbonne, abritent le point le plus occidental du continent européen.


Un titan du bushcraft

© Courtoisie André-François Bourbeau

En juin dernier, l’univers du bushcraft — le savoir-faire ancestral en forêt — a eu droit à un grand rassemblement d’une semaine, en Alberta : le Global Bushcraft Symposium. Pour l’occasion, quelque 250 experts de partout sur la planète ont partagé leurs connaissances. Invité comme l’une des légendes de la discipline, André-François Bourbeau y a été accueilli en grand pour y prononcer une conférence.

« J’ai été reçu comme le capitaine Kirk qui débarque à un congrès de geeks de Star Trek! », rigole le spécialiste. Aux côtés des réputés Mors Kochanski, David Westcott et David Halloday, AFB a été présenté comme l’un des quatre titans du bushcraft en Amérique du Nord, lors de cet événement animé par Les Stroud, bien connu pour son émission de télévision Survivorman.

« Être honoré comme ça, c’était vraiment spécial, ajoute l’universitaire. Ils ont une culture du respect pour ceux qui les ont précédés. Comme les autochtones, les aînés sont vénérés dans la culture du bushcraft. »

Dans le but de poursuivre la mission de promotion de la discipline et la mise en place de bonnes pratiques, l’événement a aussi donné lieu à la fondation de l’International Survival and Bushcraft Association. « Elle permettra notamment d’éviter de voir apparaître d’autres Bear Grylls, qui font n’importe quoi, n’importe comment et qui disent des niaiseries », précise André-François Bourbeau, impliqué dans la création de ce regroupement.

La nouvelle association organisera le prochain symposium, prévu pour 2021 en Angleterre. « Je devrais être là! », prévoit déjà l’expert québécois.

bushcraftsymposium.com

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