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  • Crédit: Olivier Béart, Traversée du Lac-Saint-Jean

Traversée du Lac-Saint-Jean en fatbike : cramponné sur la route glacée

L’hiver ouvre de nouveaux horizons et des nouvelles destinations lorsque les routes d’eau se transforment en routes de glace. Pour en profiter et pour me lancer un vrai défi hivernal, j’ai décidé de participer à la Traversée du lac Saint-Jean en vélo. Une drôle d’idée pour un néophyte qui n’avait aucune d’expérience en fatbike. Mais le goût de l'aventure a encore eu le dessus.

Je roule depuis trois heures sur un désert de glace. J’ai déjà parcouru 27 des 32 km de la traversée du lac Saint-Jean et chaque mètre supplémentaire est de plus en plus pénible à franchir. Le vent vient de se lever et il souffle à 30 km/h, en plein visage. Je n’entends que le bruit de mes pneus, qui mordent tant bien que mal dans la neige. Le paysage est à couper le souffle. Bénévoles, cyclistes et simples curieux se sont donnés rendez-vous sur un immense terrain de jeu glacé, le lac Saint-Jean, qui brille sous le chaud soleil de mars. 

Mes jambes hurlent. Je suis crevé. Mais je suis plus vivant que jamais. Je suis un animal nordique dans son élément. J'aime le froid. J'aime parcourir son territoire.

Le lac Saint-Jean est mon terrain de jeu depuis que j’ai décidé de m’établir dans la région, il y maintenant huit ans. Chaque année, j’anticipe avec impatience les premiers flocons de neige. Puis, j'attends que la glace prenne pour m’ouvrir de nouveaux horizons. Traverser le lac à vélo me semblait une idée géniale pour découvrir le lac sous un nouvel angle. 


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Un défi bien « givré »

Les froids historiques enregistrés l’hiver dernier n’ont pas refroidi les ardeurs des 72 cyclistes qui se sont présentés à la ligne de départ pour traverser le lac Saint-Jean à vélo le 1er mars dernier. Pour confirmer la tendance météo, le thermostat affichait d’ailleurs -25°C lors du départ ! « Un beau défi givré », souligne David Lecointre, l’instigateur et président de l’événement, qui à sa deuxième édition, jouit déjà d’une renommée internationale grandissante avec des cyclistes provenant de cinq pays, soit le Canada, les États-Unis, la Belgique, la France et l’Italie. 

L’édition pilote de 2014 avait créé un « buzz » autour de l’événement, alors qu’une tempête avait forcé les cyclistes à traverser le lac… en marchant. La traversée, qui devait durer trois heures, s’est alors transformée en « enfer » de 9 heures, soit autant de temps qu’il faut pour traverser le lac à la nage ! Seulement cinq des 21 participants avaient franchi les 32 km qui séparent Péribonka de Roberval. Le mythe de la Traversée du lac Saint-Jean à vélo était né. Il faut respecter le lac, car on ne sait jamais ce qu’il nous réserve…

Crédit: Olivier Beart, La Traversée du Lac-St-Jean à vélo

Pour éviter ce genre de situation, le parcours a été surfacé et balisé par une équipe de motoneigistes pendant les cinq semaines précédant l’événement. « Si la surface n’est pas durcie, il n’y a pas de traversée », lance David Lecointre. En sortant du parcours, le vélo s’enfonçait en effet profondément dans la neige. 

C’est donc sur une surface bien durcie que je suis parti de Péribonka, dans la première vague de cyclistes, en mode découverte, suivi de deux autres vagues plus compétitives. Au départ, la surface est rapide, les jambes sont reposées et les kilomètres défilent à fière allure. En moins d’une heure, j’arrive au village de pêche de Péribonka, au km 10, lieu du premier point de ravitaillement où l’on peut profiter de l’accueil légendaire des Bleuets. Au menu, des encouragements soutenus d’une quinzaine de bénévoles, un bouillon de poulet bien chaud et un carré aux dattes fait maison pour donner une bonne dose de courage. 

Après un départ canon, la cadence diminue tranquillement. « Même s’il n’y a pas de dénivelé, j’ai l’impression de monter un col de 30 km », lance Olivier Béart, journaliste belge pour le magazine de vélo Vojo, qui m’accompagne pour une partie du parcours. Son compatriote, Bernard Dejaeghere, a aussi été étonné par le parcours. « Je ne pensais pas que ça serait aussi intéressant, car c’est plat, tout droit et tout blanc. C’est en roulant qu’on se rend compte de la difficulté du parcours, avec l’impact du vent, des traces, des changements de revêtement, de la gestion du froid et des ravitaillements. Il faut donc être très attentif », note le Belge qui est tombé trois fois. 


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Plus on avance et plus on se rend compte de l’immensité du lac. Au km 15, on se retrouve au beau milieu d’un grand désert blanc, un spectacle dépaysant, autant pour les Québécois que pour les cyclistes étrangers. La journée est magnifique et les conditions idéales pour traverser le lac à vélo. Tout le contraire des conditions de l’an dernier. 

Malgré tout, les derniers kilomètres sont pénibles et la concentration est de mise pour franchir les zones de neige molle, creusées par les cyclistes qui me devancent. Au loin, j’aperçois Roberval et son Village sur glace, un havre d’activités hivernales où sont réunies plus de 200 cabanes qui grouillent d’activité. Une vue qui m’encourage à continuer pour accomplir le défi que je me suis lancé. Après 3h51 de vélo sur la neige, j’atteins finalement la ligne d’arrivée, tout comme le feront 70 des 72 coureurs présents sur la ligne de départ. « C’est un défi très intéressant, car c’est accessible à presque tout le monde », croit David Lecointre. Si les plus rapides ont complété le parcours en un peu moins de deux heures, certains ont pris près de six heures pour traverser l’étendue glacée en toute tranquillité. 

Crédit: Olivier Beart, La Traversée du Lac-St-Jean à vélo

Une visibilité internationale

La 2e Traversée du Lac Saint-Jean à vélo aura généré des articles dans pas moins de 12 magazines internationaux, répartis dans six pays, dont cinq en Europe. De plus, le film tourné lors de la première édition a été sélectionné par le Bicycle film festival qui sera diffusé dans 24 grandes villes aux quatre coins de la planète. 

À entendre les commentaires des participants, le bouche à oreille fera aussi son chemin, au Québec comme à l’étranger, car les cyclistes étaient ravis du professionnalisme de l’organisation et de l’accueil chaleureux des bénévoles. « On a été accueillis comme des rockstars ! », lance Bill Rodick, un cycliste du New Jersey, qui, comme plusieurs participants, a été hébergé dans une famille d’accueil lors de son passage à Péribonka. « Nous avons rencontré des amis en venant ici. Nous reviendrons », note Kendall Prescott qui est venu traverser le lac Saint-Jean avec sa fille Perrin pour se lancer un défi de taille. « Les conditions étaient parfaites, mais c’était quand même très difficile. Je n’ose pas m’imaginer ce que c’est lorsqu’il neige », ajoute cette dernière. 

En plus des familles d’accueil à Péribonka, c’est une armée de plus de 100 bénévoles, dont 40 motoneigistes, qui a été déployée pour assurer la sécurité tout au long du parcours et accueillir les cyclistes aux quatre points de ravitaillement. 

Amateurs de ski de fond qui accompagnent les cyclistes pour la traversée, des pêcheurs sur glace près des points de ravitaillement, des motoneigistes de passage ou encore des enfants qui s’amusent dans la neige, ont aussi profité de l’événement pour venir célébrer l’hiver.  « C’est une grande fête hivernale. Pleins d’autres activités comme le ski de fond, le kiteski, la raquette et autres pourraient s’ajouter à l’événement pour savourer les plaisirs de l’hiver », rêve David Lecointre, d’origine belge, qui est arrivé dans la région en 2000. 

Après seulement deux ans, il est fier du parcours accompli car il a réussi ses objectifs de faire plus de vélo en hiver et de créer un événement vitrine pour le tourisme hivernal au Lac-Saint-Jean.

Pour permettre à un plus grand nombre de personnes d’essayer le sport, un nombre illimité de participants pourra essayer un nouveau parcours populaire de 10 km au départ de Péribonka. De plus, une randonnée boréale de 15 km sera organisée au Tobo-Ski, un centre de vélo de montagne à St-Félicien, le dimanche.

velosurlac.com


Au-delà du fatski

D’une superficie de 1 003 km2, le lac Saint-Jean est le plus grand lac habité du Québec et aussi un terrain de jeu idéal pour la pratique des sports hivernaux. Voici quelques suggestions supplémentaires pour en profiter.  

Kiteski. Lorsque les vents sont de la partie, chaussez vos skis et attachez-vous à votre cerf-volant pour faire le tour du lac. Au départ de Saint-Gédéon, il est facilement possible d’aller prendre un café à Roberval, dîner à Péribonka et revenir à son point de départ avant la fin de la journée.  Pour prévoir un séjour, contactez la communauté de Kite Air Lib (sur Facebook) ou Les voiles Carl Veilleux, une école de paraski (lesvoilescarlveilleux.com).

Ski hors piste ou en raquette. Chaque année, Mario Bilodeau et Mario Cantin, deux amoureux de plein air, proposent le Double Défi des deux Mario. Organisé par la Fondation Sur la pointe des pieds, les aventuriers invitent la population à se joindre à eux pour traverser le lac Saint-Jean dans le cadre d’une levée de fonds pour les jeunes atteints du cancer. Du 3 au 7 février 2016. pointedespieds.com/doubledefi-fr/index/

Ski de patin. Lorsque la neige forme une croûte au printemps, les conditions sont idéales pour faire du ski de patin. Il est alors facile de traverser le lac rapidement. Vous pouvez aussi prévoir une traversée près de la date de la Traversée en vélo, sur le sentier balisé par les motoneiges.

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