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  • Crédit: Sylvain Fortier

Sylvain Fortier et son Challenge vert

Une course contre la montre de 33 000 milles nautiques en voilier, sans compter près de cinq cents kilomètres à vélo pour planter cinq arbres, un sur chaque continent. Voilà le défi que s’est lancé Sylvain Fortier, un Québécois de 36 ans. Son Challenge vert commencera le 16 juin au bassin Louise, à Québec, pour s’y terminer après des arrêts à Brest (France), à Dakar (Sénégal), à Salvatore (Brésil), à Sydney (Australie) et à Tokyo (Japon).

Les cheveux noués derrière la tête, le casque de vélo dans les mains, Sylvain sourit à qui veut bien lui donner un peu d’humanité en retour. Lorsqu’on le questionne sur le but de son épopée, il répond tout de go : « Allumer des gens! Les amener à se poser des questions, à se poser les vraies questions! » Et quelles sont-elles? « Ce sont les questions sociales, environnementales. Qu’est-ce qu’on veut léguer à nos enfants, qu’est-ce qu’on veut voir changer? Je veux réveiller la flamme des gens. C’est facile de chialer, de mettre la faute sur les autres. Bouger, c’est autre chose. »

Son Challenge vert allie donc sensibilisation, sport et environnement. Aucun Québécois n’a parcouru de si grandes distances en mer en si peu de temps. Chaque jour comptera, car les saisons l’obligent à passer certains points à une période précise, pour éviter les tempêtes. Seulement entre Tokyo et Québec, Sylvain Fortier passera 150 jours – plus de 4 mois — sans toucher terre. Est-ce faisable en un an? « Je te dirai ça en revenant! »

Pour survivre sur son embarcation de neuf mètres de long, Sylvain s’est installé un vélo stationnaire : « Il me faudra bouger tout le temps, pour garder la forme. Je devrai m’instaurer une routine, une discipline plutôt sévère pour garder le rythme et une certaine notion du temps », prévoit-il un brin inquiet, mais surtout enthousiaste devant le voyage qui l’attend.

Loréline, sa monture pour l’incroyable périple, n’en est pas à son premier voyage. Elle a été construite par Geneviève Ondin selon les plans de Michel Joubert en 1979, et Sylvain l’a acquise il y a quatre ans et a déjà traversé deux fois l’Atlantique Nord à son bord. Après tout ce temps, il connaît toutes les coutures de son voilier orange. « J’ai passé un an à le réparer, le sceller et l’améliorer. J’ai du nouvel équipement, de la bouffe en masse, une trousse de premiers soins béton. Tout est prêt. »

Crédit: Sylvain FortierDe plus, grâce à un détecteur de radar, Sylvain pourra dormir trois ou quatre heures à la fois, le « gros luxe », puisqu’il faut habituellement surveiller la mer toutes les 20 minutes pour éviter les collisions.

Les arbres, une inspiration sénégalaise

En 2008, Sylvain Fortier quitte le Québec pour la première fois de sa vie pour une traversée de l’Atlantique à la voile. Direction : Dakar, où il était attendu pour enseigner dans une école primaire avec l’organisme Mer et Monde. Cette expérience l’a incroyablement touché, au point de modifier sa trajectoire de vie. Au cours de son séjour, Sylvain plantera un arbre fruitier dans la cour d’école de sa communauté d’accueil. Deux ans plus tard, après un autre voyage qui l’amène à nouveau à Dakar, il constate l’apport que cet arbre a amené à la communauté. Un geste si simple avec des années de répercussions. « Les arbres servent de poumons à la planète. L’environnement est probablement le lien le plus fort pour tous les humains. Nous en avons tous besoin pour vivre. Si seulement tous les citadins pouvaient reprendre contact avec la nature, je suis certain qu’il y aurait moins de gaspillage. »

Avec ces plantations, Sylvain (qui a étudié en foresterie) souhaite donner un peu plus à la planète qu’il n’en prend. « Évidemment, il faut plus que cinq arbres. Au moins, c’est un départ, un appel à tous. Si chacun le faisait, on aurait une maudite belle forêt! »

La solitude

« Je doute souvent : pourquoi me donner tant de peine? Vais-je vraiment faire une différence? Puis, après mes conférences dans les écoles, au Salon du bateau de Montréal, auprès des amis, je me rends compte que les gens embarquent dans le projet, voyagent avec moi. Les médias ont commencé à triper sur mon cas. Le téléphone ne dérougit pas. Quand je serai en mer, le calme fera du bien. »Crédit: Sylvain Fortier

La solitude ne sera pas totale : une équipe à terre suivra Sylvain Fortier. Grâce à la radio ondes courtes, le navigateur pourra discuter avec des météorologues spécialisés pour les différentes régions du globe à visiter. « En mer, je serai souvent trop loin des côtes pour capter les bulletins météo. J’aurai donc besoin d’avoir des informations précises. Leur apport sera vital. » Pourquoi partir seul? « Je n’ai pas vraiment choisi le solo. Disons que les circonstances l’ont fait pour moi. Le temps passe, je me suis dit que si je voulais vraiment faire ce tour du monde, je devais cesser d’attendre le moment parfait. Il n’y a rien de parfait. On me dit souvent que je suis chanceux de vivre ce trip. Je crois plutôt que j’ai créé ma chance. »

Eau

Comment faire pour boire, se laver, cuisiner, laver la vaisselle avec un réservoir d’eau douce de 280 litres pour 150 jours en mer? Santé Canada recommande de boire au moins 3 litres d’eau par jour. Il va donc en manquer! « Non : il y a la pluie! J’ai installé des genres de gouttières sur ma grand-voile pour que je puisse récupérer les averses dans des chaudières afin de me laver. » Il devra aussi être très économe. Garder l’eau des pâtes pour rincer la vaisselle, qui aura été lavée préalablement à l’eau salée. Le fameux sel qui ronge tout sur son passage. Les douches sont donc essentielles pour ne pas se retrouver la peau à vif, et un lavage de manteau sauvera la dégradation trop rapide des fermetures éclair. « Vivre avec si peu d’eau potable alors qu’on est entouré d’eau nous permet de prendre conscience de la nécessité d’en avoir pour vivre. »

Le départ est proche et l’océan l’appelle. Le bonheur, simple, d’être sur l’eau, en harmonie avec les éléments. Se laisser porter par le vent.

Encore plus
Pour suivre le voyage de Sylvain, consultez son site internet : challengevertautourdumonde.com

Crédit: Sylvain Fortier

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