Rechercher dans le site espaces.ca
  • Source: iStock

Plan de transport de Montréal : la Vélorution tranquille?

Douze ans après l’adoption de la politique sur le vélo par le gouvernement provincial, la Ville de Montréal s’engage enfin envers les cyclistes. Si tout se déroule selon le plan de l’administration Tremblay, sept ambitieux projets verront le jour d’ici dix ans et modifieront profondément les habitudes de déplacements sur l’île.

C’est du moins ce que l’on peut espérer du Plan de transport 2007 que le maire de Montréal a présenté en mai dernier et qui sera officiellement approuvé en novembre prochain. En tout, c’est une somme de près de 134 millions de dollars sur 10 ans qui est prévue uniquement pour développer l’usage du vélo. Il était temps! Entre un réseau cyclable fragmenté, des automobilistes impatients, des travaux difficiles à contourner, des chauffeurs de camion ou de taxi furibonds de devoir partager « leur » route et les milliers de trous à éviter, les 42 % de Montréalais qui pédalent empruntent des parcours souvent chaotiques, voire dangereux!

Déplacements d’actifs

En plus de l’annonce récente du nouvel axe cyclable est-ouest sur le boulevard de Maisonneuve, l’équipe du maire Tremblay a donc l’intention de doubler le réseau cyclable montréalais en y ajoutant 400 kilomètres d’ici sept ans! Une tâche énorme, dont l’objectif est d’intégrer l’usage de ce mode de déplacement dans une perspective « utilitaire ». Le budget projeté sera en partie financé par l’intermédiaire du Fonds Vert : une façon pour le gouvernement de « participer à l’effort québécois en matière de réduction des gaz à effet de serre », affirme la ministre des Transports, Julie Boulet. À la bonne heure!

Aussi, près de 23 millions de dollars seront dédiés à la réfection et à l’entretien des 380 kilomètres de voies existantes, et 35 kilomètres du réseau montréalais seront déneigés dès cet hiver pour permettre une circulation toute l’année. L’utilisation par les cyclistes d’une voie réservée aux autobus et aux taxis fera partie d’un projet pilote et les places de stationnement (leur nombre estimé oscille entre 7000 et 9000) devraient quintupler.

Crédit: Christian Lévesque« C’est un plan ambitieux et très emballant! », s’exclame la présidente de Vélo Québec, Suzanne Lareau. Instigatrice de l’initiative Vélo-Boulot (qui prône depuis 2001 l’usage de la bicyclette pour se rendre au travail), elle se dit ravie de l’annonce : « Le plan démontre dans sa vision globale la volonté concrète de la mairie de mettre un frein à l’usage de la voiture en favorisant les transports en commun, la marche et le vélo ».

« Dès cet été, Stationnement Montréal va installer sur 1000 poteaux de parcomètres un système d’anneau qui permettra de stationner deux vélos », annonce le responsable du transport collectif et de l’aménagement urbain au comité exécutif de la Ville, André Lavallée. « Si l’expérience est concluante, on l’élargira, ce qui permettra d’ajouter rapidement près de 15 000 places de stationnement pour vélos au centre-ville », poursuit-il.

Outre un projet de vélos en libre-service, la création d’un réseau de stations pour vélos destinées à garer des centaines de bicyclettes et offrir divers services aux cyclistes (casiers, boutiques de réparation, douches…) est également à l’étude. Enfin, la création d’un comité cycliste à la Ville devrait permettre de coordonner plus efficacement l’ensemble des chantiers. Mais ce n’est pas tout : l’ajout d’équipement de supports, la permission d’emprunter une partie des voies réservées aux taxis et aux autobus de la Société de Transport de Montréal ainsi que la révision des règles d’accès au réseau du métro et aux trains de banlieue, c’est une toute nouvelle façon de vivre en ville que la mairie propose aux cyclistes.

Pour l’amour de Kyoto

Peu encombrant, rapide, efficace et non polluant, le vélo est enfin envisagé comme une solution sérieuse pour contribuer à l’amélioration de l’environnement urbain. Déjà en 1995, la politique sur le vélo du gouvernement du Québec prévoyait « l’encouragement progressif de l’utilisation de la bicyclette comme mode de transport », en précisant ses effets bénéfiques sur « la réduction de consommation d’énergie, (...) la bonne forme physique de la population ainsi que la préservation de la qualité de l’environnement ».

Crédit: Christian LévesqueActuellement « en cours de révision » selon la ministre des Transports, le principal succès de cette politique demeure l’implantation de la Route Verte, dont les 4300 kilomètres seront officiellement inaugurés cet été dans 16 régions touristiques. Mais entre 2000 et 2005, alors que l’on achevait cet itinéraire à vocation récréative (le plus vaste du genre en Amérique du Nord), rien ne se décidait dans les villes, où la pratique du vélo comme mode de transport actif (ex.vélo-boulot) augmentait de 19 à 34 % parmi la population cycliste. Une tendance qui a fait un bond de 44 % dans la métropole! Rien d’étonnant quand on sait que, dans les villes de la province, « plus d’un déplacement sur trois entre le domicile et le travail fait moins de cinq kilomètres ». Une distance facile à parcourir en pédalant modérément. En zone urbaine, 22 % des déplacements à vélo sont utilitaires. C’est là aussi que l’on dénombre le plus d’accidents graves impliquant voiture et vélo…

Révolution!

Dans son plan, la Ville avoue que « les besoins des cyclistes ont changé et que leurs habitudes de déplacement ont nettement évolué. Il est temps […] d’innover et de repenser la fonction même du réseau cyclable ». Les quelques dizaines de participants réguliers de la manifestation de la « Masse Critique », qui militent depuis plusieurs années, le savent bien. Inspirée d’un mouvement de contestation pacifique démarré à San Fransisco en 1992, cette réunion cyclable « auto-organisée » veut « susciter une réflexion sur la place accordée aux voitures en milieu urbain et revendiquer de meilleures infrastructures pour promouvoir le vélo comme mode de transport écologique, durable, pratique et économique », explique Fannie Dulude, l’une des participantes de ces événements. La lutte « vélorutionnaire » entamée dans les années 70 par le cycliste Robert Silverman semble donc avoir enfin trouvé un écho auprès des pouvoirs publics de Montréal. Reste à sensibiliser les automobilistes au partage respectueux de la chaussée...

 
Commentaires (0)
Participer à la discussion!