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  • Crédit: Alexandre Genois

Ultra-Trail : trois marathons en montagne

Le 30 août dernier, le Québécois Alexandre Genois commençait sa course avec près de 2 300 coureurs sur un trajet de 168 km avec 9 600 mètres de dénivelé positif. Il faut entre 20 et 40 heures pour terminer le The North Face Ultra-Trail du Mont-Blanc. Faut-il être maso pour s’inscrire à une telle épreuve?

C’est du moins ce que le commun des mortels pourrait penser. Mais de plus en plus d’adeptes s’adonnent à ces courses ultra-trail. Difficile toutefois d’en établir une définition juste : aucun organisme international ne régule cette discipline. Les conventions veulent qu’un ultra-trail fasse l’équivalent d’au moins trois marathons, soit environ 125 km, à moins de présenter de grandes difficultés techniques, comme la traversée d’un désert, l’ascension de volcans ou un relief fortement accidenté.

Pour le professeur responsable de la formation pratique au département de kinésiologie de la Faculté de médecine de l’Université Laval et ultramarathonien Richard Chouinard, tous ceux qui le souhaitent peuvent accéder à la forme physique nécessaire pour parcourir un ultra-trail, « à condition de suivre l’entrainement nécessaire! » Et il est plutôt exigeant : pour courir des centaines de kilomètres, il faut du cardio, de la force musculaire, un bon gainage, mais aussi beaucoup de motivation. Physiquement, d’abord, il faut s’entrainer à courir, mais également à marcher. « Une telle course ne peut pas se faire à un rythme de sprint. Il faut savoir écouter son corps et accepter de marcher dans les montées », affirme Richard Chouinard. « Et il faut savoir garder une vitesse de croisière pour économiser son énergie. »

Par rapport au marathon, l’entrainement pour l’ultra-trail demande de développer la proprioception : « En sentier, on rencontre des racines, des roches, des reliefs inégaux. Il faut donc avoir un bon équilibre, une réactivité affutée au niveau des chevilles et des stabilisateurs. Le secret : il faut pratiquer! » affirme Richard Chouinard. Alexandre Genois accumule les courses de grand fond. Il s’entraine à la course, mais aussi au vélo et à la natation, en plus du ski de fond en hiver. Dans sa semaine, l’étudiant s’entraine de cinq à six fois, avec au moins deux courses de 20 à 25 km.

L’ultra-trail au Québec

Crédit: Pascal Tournaire

La discipline de l’ultra-trail au Québec est encore toute jeune. Chaque année, la province voit de plus en plus de courses se créer. Aucun parcours de plus de 100 km n’est encore proposé. L’association Ultramarathon Québec permet d’être à jour sur les différentes courses excédent les 42,195 km habituels des marathons.

En ce moment, la seule course qui s’apparente à un ultra-trail est l’Harricana, une course sur le sentier de la Traversée de Charlevoix de 65 km avec 1 800 mètres de dénivelé. Vous vous sentez d’attaque? Il faut s’engager à faire le parcours en deçà de 10 heures. Les coureurs professionnels doivent la faire en 4 h 30. Le 7 septembre aura aussi lieu la première édition du 65 km au mont Grand-Fonds.

Sur la scène internationale, le Québécois Sébastien Roulier ira représenter le Canada au championnat mondial d’ultra-trail au Pays de Galle (Royaume-Uni) cet automne.

Autre différence par rapport au marathon ou à l’ultramarathon : la semi-autonomie. Chaque coureur doit avoir sur lui ce qu’il faut pour passer jusqu’à cinq heures sans croiser une âme humaine. Le truc des pros : porter des bas de contention (connu aussi comme « bas de compression ») en course. « Le gainage que créent ces bas permet de retarder l’apparition de la douleur », confie Richard Chouinard.

L’alimentation et l’hydratation jouent aussi un rôle primordial. Il faut savoir s’arrêter, prendre le temps de manger, de s’hydrater et même de se doucher : « Le plus difficile, c’est de s’arrêter. On a peur de ne pas repartir, de perdre le rythme. Mais après une mini-sieste, un ravitaillement, repartir est un peu moins difficile », affirme Alexandre Genois. Pour Richard Chouinard, l’arrêt complet peut être bénéfique, selon l’athlète : « Une sieste d’une vingtaine de minutes, les jambes légèrement surélevées, peut permettre de retrouver le focus et la motivation, sans récupération musculaire. »

Une course ou un voyage?

Mentalement, le défi est grand : « Quand on court dans une solitude quasi complète pendant 20 heures, il faut être bien avec soi-même, en paix. » Les courses commencent habituellement très tôt le matin, parfois même avant l’aurore et une bonne partie de la course se fait à la frontale. « C’est vraiment une épreuve philosophique, où on entre dans une sorte de communion avec la route à faire et le temps présent. Il y a une sorte de méditation qui se fait quand on court durant 30 heures », relate Alexandre Genois avec passion.

« J’ai l’impression qu’avec autant d’heures de course, je crée une relation, silencieuse souvent, avec les autres coureurs. On se croise, on court côte à côte pendant un moment, on se soutient mentalement. C’est une épreuve beaucoup plus contre soi-même que contre les autres et c’est ce qui me plait », affirme le coureur québécois.

Après la course

Sur le plan physique, les répercussions sont bien réelles : « Après la Transmartinique en décembre dernier, j’ai perdu la plupart de mes ongles d’orteils, à cause de la friction dans mes chaussures et de l’humidité. Et sans parler évidemment des ampoules aux pieds… » Sans compter que le corps a besoin de récupérer et que la faim se fait vraiment sentir pendant les semaines suivantes : « Après mes courses, j’en ai presque pour une semaine à vouloir dormir 15 heures par nuit, sauf que la vie continue et le cadran sonne le matin… »

Est-ce que de si longues courses usent le corps plus vite? « Non, je ne crois pas », affirme Richard Chouinard. Je ne recommande toutefois pas de faire des ultra-trails avant d’avoir atteint la vingtaine ni d’en faire plus que deux en six mois. » Surtout, il faut savoir être à l’écoute de son corps, qu’on soit un homme ou une femme.

Encore plus
ultramarathonquebec.ca

 
Commentaires (1)
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karlf - 02/10/2013 13:15
Pour le 65 km d'Harricana, on prévoyait 4:30 mais cela a été un peu plus difficile que prévu...meilleur temps, 5:50